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Malgré une procédure simplifiée, le cadre légal demeure complexe.

On parle de détachement de travailleurs lorsqu’un employeur envoie une partie de ses travailleurs exécuter, en son nom et pour son propre compte, une prestation de travail dans un État autre que l’État où l’employeur a son siège et dans lequel les travailleurs exécutent habituellement leur travail.

En vertu des accords bilatéraux entre la Suisse et l’Union Européenne, les travailleurs détachés en Suisse par des sociétés dont le siège se trouve en France n’ont pas besoin d’autorisation pour un séjour en vue d’y fournir une prestation d’une durée inférieure à 90 jours par année civile. La durée d’activité maximale autorisée s’applique tant à l’entreprise de détachement qu’à l’employé détaché.

En revanche, ces travailleurs doivent être annoncés au préalable par leur employeur, conformément aux dispositions suisses de la réglementation sur les travailleurs détachés. L’annonce doit être faite au moyen d’un formulaire officiel disponible en ligne et doit contenir l’identité et le salaire des personnes détachées en Suisse, l’activité déployée en Suisse, et le lieu où les travaux seront exécutés. Le travail ne peut débuter qu’au plus tôt huit jours après cette annonce.

L’annonce n’est normalement pas obligatoire pour les travaux d’une durée de huit jours ou moins par année civile. Cependant, les travaux dans les domaines suivants sont soumis à l’annonce même si leur durée est inférieure à cette limite :
• la construction, le génie civil et le second oeuvre ;
• la restauration ;
• le nettoyage industriel ou domestique ;
• le secteur de la surveillance et de la sécurité ;
• le commerce itinérant ;
• l’industrie du sexe ;
• l’aménagement ou de l’entretien paysager.

En outre, bien que les travailleurs restent soumis au contrat de travail qui les lie à leur employeur et au système de sécurité sociale s’y rattachant, l’employeur est tenu de garantir aux travailleurs détachés au moins les conditions de travail et de salaire prescrites par le droit suisse, les conventions collectives de travail déclarées de force obligatoire ou les contrats types de travail dans les domaines suivants :
• la rémunération minimale, y compris les suppléments;
• la durée du travail et du repos ;
• la durée minimale des vacances ;
• la sécurité, la santé et l’hygiène au travail ;
• la protection des femmes enceintes et des accouchées, des enfants et des jeunes ; et
• la non-discrimination, notamment l’égalité de traitement entre femmes et hommes.

Cependant, les activités des agences de placement et de locations de services établies en France ainsi que les services financiers ne bénéficient pas de la procédure d’annonce simplifiée.

Ce genre de services est soumis à une autorisation préalable, étant entendu qu’il n’existe aucun droit à l’octroi de l’autorisation. La location de services directe ou indirecte de personnel à partir de l’étranger est interdite.

Finalement, si l’entreprise détache des travailleurs en Suisse pour une durée supérieure à 90 jours par année civile, elle doit au préalable solliciter une autorisation de séjour, étant entendu qu’il n’existe aucun droit à l’octroi d’une telle autorisation.

En résumé, le détachement de travailleurs par des entreprises françaises vers la Suisse est en principe possible, mais sera toujours soumis à un cadre légal complexe. On peut noter aussi qu’un détachement peut, selon les circonstances, entraîner la création un établissement stable du point de vue du droit fiscal suisse. Pour éviter tous risques légaux pour l’entreprise et les employés concernés, il est recommandé de procéder à une analyse approfondie du cadre légal et de la procédure applicable le plus tôt possible avant le détachement prévu.

Source : Magazine Aspects, « Dossier spécial ferroviaire », Rubrique juridique et fiscale, Article rédigé par Dr Philippe Monnier, Avocat chez Baker McKenzie Zurich – Juin 2017